Pourquoi et comment devient-on chercheure en géographie ?
" Or il y avait un Éléphant — un Éléphant tout neuf — un Enfant d'Éléphant — plein d'une insatiable curiosité ; cela veut dire qu'il faisait toujours un tas de questions. Et il demeurait en Afrique, et il remplissait toute l'Afrique de ses insatiables curiosités. ", L'Enfant d'Élephant, dans Just so Stories de Rudyard Kipling.
« Je pense que la condition préalable pour devenir chercheure, c'est d'avoir une « insatiable curiosité », curiosité du monde qui nous entoure, curiosité de savoir - et d'expliquer - comment et pourquoi les choses sont comme elles sont.
Dans mon cas, cette curiosité a été la plus forte pour les Sciences de la Terre et du Vivant (biologie, géographie, physique). Après le lycée, j'ai choisi d'étudier les « sciences atmosphériques », ce qui nécessite une base solide en physique, mathématique et statistique. L'interdisciplinarité étant de plus en plus pertinente, je mène actuellement des recherches conjointes en sciences atmosphériques (climat) et en géographie physique. »
Quelles sont les difficultés rencontrées dans le domaine de la recherche ?
« Il y a plusieurs défis à relever mais personnellement, le plus cinglant pour le moment, c'est le manque de financement et de soutien de la recherche publique. C'est difficile d'attirer des jeunes à une carrière dans la recherche car il y a une pénurie croissante de postes, et tous les domaines (de recherche) ne peuvent pas nouer des partenariats avec l'industrie. »
Quel est le thème de ton dernier projet de recherche ?
« De 2016 à 2019, j'ai participé au projet européen ODYSSEA, financé par l'Union Européenne dans le cadre de l'action MSCA-RISE, programme Horizon 2020 (https://www.odyssea-amazonia.org/). Il a rassemblé divers réseaux brésiliens et internationaux pour mieux répondre aux défis du développement durable en Amazonie brésilienne. Grâce à ce projet, j'ai pu connaître in situ une partie de mon pays d'origine, le Brésil, que je ne connaissais pas auparavant.
Mes activités de recherche prioritaires portent sur la question du changement climatique dans le sud de l'Amazonie, en particulier en ce qui concerne les précipitations : pouvons-nous observer des changements ? La déforestation joue-t-elle un rôle dans ces changements, le cas échéant ? Comment ? Quelles sont les perceptions du changement climatique par les habitants de l'Amazonie ? Ces questions sont au cœur des publications issues de mes recherches (voir liste ci-après, N.D.L.R.). »
Quel est ton meilleur souvenir de chercheure ?
« Je n'ai pas de souvenir particulier, je me considère surtout chanceuse d'avoir rencontré des personnes extraordinaires tout au long de – et grâce à - mon parcours de chercheure, dans de nombreuses régions du monde : des personnes dans le milieu académique mais pas seulement, des personnes très humaines, accessibles, généreuses, avec les pieds sur terre. J'apprécie beaucoup les effets positifs qu'ont eu ces personnes sur moi. »
Pour terminer, une anecdote sur la recherche à l'IGARUN ?
« J'ai récemment donné une conférence au Café Géo de l'IGARUN (novembre 2019). J'ai parlé des observations et des perceptions du climat ainsi que du changement climatique en Amazonie. La salle était pleine ! Il y avait à peu près 50 personnes, la plupart étant des étudiants. C'est regrettable que cette magnifique région fasse les gros titres à cause de la déforestation et de la dégradation environnementale. Mais j'étais touchée que l'Amazonie et le futur de cette région intéresse autant de monde… »
Beatriz FUNATSU, Chargée de recherche CNRS, LETG Nantes UMR 6554-CNRS, Université de Nantes