Analyse du premier tour de l’élection présidentielle de 2017 en Loire-Atlantique

Résumé

Cet article analyse les résultats du premier tour de l’élection présidentielle de 2017 à l’échelle des communes de Loire Atlantique et à l’échelle des bureaux de vote des communes de Nantes Métropole.

Index

Mots-clés

géographie électorale, géographie urbaine, Nantes Métropole, classification ascendante hiérarchique

Texte

Au lendemain de l’élection présidentielle, de nombreuses publications ont porté sur l’analyse du scrutin (Batardy et Rivière, 2017 ; Rivière, 2017). Mais peu d’articles ont essayé de mettre en perspective les résultats électoraux à l’échelle communale avec ceux à l’échelle des bureaux de vote. C’est ce que propose cette étude avec dans un premier temps une analyse typologique des communes à l’échelle de la Loire-Atlantique, puis à l’échelle des bureaux de vote des 24 communes de Nantes Métropole. 

À l’issue du premier tour de l’élection présidentielle de 2017, à l’échelle nationale, c’est E. Macron qui arrive en tête avec 18 % des inscrits, suivi par M. Le Pen (16 %), F. Fillon (15 %), J.-L. Mélenchon (15 %) et enfin B. Hamon (5 %) pour ne prendre que les cinq premiers candidats. En Loire-Atlantique, c’est également E. Macron qui arrive premier avec un score supérieur (23 %). Mais l’ordre des suivants est différent puisque J.-L. Mélenchon est en seconde position avec 18 % des inscrits, suivi par F. Fillon (16 %), puis M. Le Pen (11 %) et enfin B. Hamon (6 %). Par ailleurs si l’abstention est de 22 % des inscrits à l’échelle nationale, elle est plus faible en Loire-Atlantique avec 17 %. Bien entendu, ces chiffres sont des valeurs moyennes qui cachent des disparités à l’échelle communale et a fortiori à celle des bureaux de vote.

Les 212 communes de Loire Atlantique ont fait l’objet d’une typologie prenant en compte les résultats obtenus par les cinq premiers candidats en pourcentage d’inscrits ainsi que l’abstention1 (fig. 1).

Figure 1 - Des ensembles électoraux homogènes à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle 2017

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Chaque commune du département est associée à un profil-type caractérisé par un écart à la moyenne plus ou moins important pour chacune des variables (identifié par un nombre de +). Le report sur une carte de cette typologie dessine des regroupements de communes identiques (fig. 1). Les communes du littoral se distinguent ainsi par l’importance d’un vote de droite en faveur de F. Fillon, comme à la Baule avec 37 % des inscrits, ou à Pornic (30 %), soit des chiffres bien supérieurs à la moyenne départementale. Plus au sud, dans le pays de Retz, c’est le vote d’extrême droite qui est prégnant. M. Le Pen obtient ainsi à Villeneuve-en-Retz plus de 20 % des inscrits, soit le double de son score en Loire-Atlantique. Ces mêmes caractéristiques d’un vote de droite ou d’extrême droite s’observent à l’est du département, autour des communes de Chateaubriand ou de Pannecé. En 2017, J.-L. Mélenchon est le candidat commun de la France Insoumise et du PCF. En Brière, qui fut un bastion historique du PCF dans les années 1970, l’abstention est élevée et J.-L. Mélenchon y obtient de nombreuses voix, tout comme, mais dans une moindre mesure, M. Le Pen. Ce profil-type s’observe également autour de Blain, rendu visible par l’utilisation des résultats et du découpage des bureaux de vote2 pour les communes de la Métropole. Les mêmes variables ont donc été utilisées en vue de construire une seconde typologie, mais cette fois à l’échelle des 475 bureaux de vote des 24 communes de Nantes Métropole (fig. 2a).

Figure 2a - Une mosaïque électorale des bureaux de vote de Nantes Métropole

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Le même procédé est utilisé pour obtenir à nouveau des profils-type. Dans la Métropole E. Macron obtient 25 % des voix, suivi par J.-L. Mélenchon (19 %), F. Fillon (15 %), B. Hamon (8 %), et M. Le Pen (7 %). E. Macron, B. Hamon et J.-L. Mélenchon y réalisent donc des scores supérieurs à leur moyenne départementale. À l’inverse la candidate d’extrême droite y obtient un score moins élevé tout comme F. Fillon, mais dans une moindre mesure. Ce dernier obtient en effet des scores élevés dans certains bureaux de vote centraux de Nantes comme dans les quartiers Montselet et Saint-Félix (fig. 2b).

Figure 2b - Une mosaïque électorale des bureaux de vote nantais

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A contrario à Nantes, les bureaux de vote du sud de la Loire sont marqués par un vote « à gauche » avec des résultats élevés obtenus par J.-L. Mélenchon et par B. Hamon, alors qu’au nord de la Loire le vote en faveur de E. Macron est plus important. Il ne ressort pas de l’analyse un profil-type « Mélenchon » et un autre « Hamon ». Au sein de l’électorat de gauche, ces deux candidats ne sont pas concurrents. Leurs scores s’additionnent. Pour des raisons de composition sociale non mises en perspective ici, c’est un vote plutôt urbain, car en dehors des bureaux de vote de Saint Herblain, Rezé, ou de Nantes, seul un bureau de vote, à Saint-Sébastien, appartient à ce profil-type. Au contraire, et toujours en lien avec des effets de composition sociale, le vote d’extrême droite n’est pas un vote de centre-ville mais un vote plus périphérique, caractérisant des communes à la limite de la Métropole. Et pour les communes de Saint-Herblain et Rezé, ce sont les bureaux de vote les plus éloignés du centre de Nantes, c’est à dire à l’ouest de Saint-Herblain et au sud de Rezé, qui donnent de nombreuses voix à M. Le Pen. À l’inverse, les profils-type des bureaux de vote des communes d’Indre ou de Saint-Jean-de-Boiseau sont identiques et montrent un vote supérieur à la moyenne en faveur de M. Le Pen et de J.-L. Mélenchon. Et si à Sautron, Vertou et Orvault plusieurs profils-type existent, ils distinguent seulement les bureaux de vote exclusivement favorables à F. Fillon et ceux favorables à ce dernier, mais également à E. Macron. 

Le découpage en bureau de vote nuance la typologie communale proposée précédemment. Les espaces fortement urbanisés sont loin d’appartenir au même profil-type électoral, en lien avec des compositions sociologiques contrastées.

Il resterait à croiser ces résultats avec les données sociologiques du recensement. C’est l’objet de l’étude en cours au laboratoire ESO Nantes3 portant sur les 24 communes de Nantes Métropole et prenant en compte les résultats électoraux et les données sociologiques pour la période 1974 - 2017 (Rapetti, 1985). 

1 L’analyse réalisée est une Classification ascendant hiérarchique (CAH) qui détermine l’appartenance de chaque entité géographique à un profil-type.

2 Il y a 200 bureaux de vote à Nantes, 39 à Saint-Herblain, et 32 à Rezé.

3 Étude menée par Jean Rivière (MCF Université de Nantes) et Christophe Batardy (Ingénieur CNRS). Intitulé du projet : « Saisir les mutations

Bibliographie

BATARDY C. et RIVIÈRE J., 2017. Nantes, un bastion socialiste partagé entre les votes Macron et Mélenchon, Métropolitiques [URL : https://www.metropolitiques.eu/Nantes-un-bastion-socialiste.html].

RAPETTI D., 1985. Vote et société dans la région nantaise étude de géographie électorale 1945-1983, Paris, éditions du CNRS, 210 p.

RIVIÈRE J., 2017. L’espace électoral des grandes villes française. Votes et structures sociales intra-urbaines lors du scrutin présidentiel de 2017, Revue française de science politique, 2017/6, vol. 67, pp. 1041-1065 [URL : https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2017-6-page-1041.htm].

Notes

1 L’analyse réalisée est une Classification ascendant hiérarchique (CAH) qui détermine l’appartenance de chaque entité géographique à un profil-type. La classification conservée en 7 groupes prend en compte 67 % de la totalité de l’information.

2 Il y a 200 bureaux de vote à Nantes, 39 à Saint-Herblain, et 32 à Rezé.

3 Étude menée par Jean Rivière (MCF Université de Nantes) et Christophe Batardy (Ingénieur CNRS). Intitulé du projet : « Saisir les mutations socio-électorales de Nantes Métropole (1974-2017) ». L’étude porte sur les communes de l’actuelle Nantes Métropole avec la prise en compte des résultats électoraux à l’échelle des bureaux de vote pour chaque élection et des données de chaque recensement à l’échelle des districts (îlots), puis IRIS.

Illustrations

Figure 1 - Des ensembles électoraux homogènes à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle 2017

Figure 1 - Des ensembles électoraux homogènes à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle 2017

Figure 2a - Une mosaïque électorale des bureaux de vote de Nantes Métropole

Figure 2a - Une mosaïque électorale des bureaux de vote de Nantes Métropole

Figure 2b - Une mosaïque électorale des bureaux de vote nantais

Figure 2b - Une mosaïque électorale des bureaux de vote nantais

Citer cet article

Référence électronique

Christophe Batardy, « Analyse du premier tour de l’élection présidentielle de 2017 en Loire-Atlantique », Cahiers Nantais [En ligne], 1-2 | 2018, mis en ligne le 04 mars 2021, consulté le 26 avril 2024. URL : http://cahiers-nantais.fr/index.php?id=1113

Auteur

Christophe Batardy

Géographe et historien, Université de Nantes, ESO Nantes UMR 6590, Ministère de la Culture

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