Avant-propos
L'objectif de ce mémoire est de déterminer la provenance, la nature et les modalités de la mise en œuvre des pierres recherchées dans un passé reculé, lors de la construction d'ouvrages défensifs (châteaux et remparts) dans l'actuel département de l'Ille-et-Vilaine (Massif armoricain). Cet article apparaît comme le développement logique d'un premier mémoire consacré à de tels édifices dans les Pays de la Loire où a été explicitée la méthodologie des investigations (Chauris, 2020). Il sera suivi d'articles sur les autres départements de l'Ouest de la France : Côtes-d'Armor, Morbihan, Finistère…
Par suite de leur ancienneté, plusieurs de ces édifices apparaissent, en un certain sens, comme des conservatoires de pierres tombées, au moins pour partie, dans un oubli injustifié. En un mot, leur étude peut être considérée comme une facette originale d'une géographie historique, voire d'une archéologie géolithique.
Vu le grand nombre de cas reconnus, des choix ont été effectués. Une attention toute particulière a été portée sur Saint-Malo qui offre, par la diversité de ses édifices défensifs, des exemples tout à fait exceptionnels. Quelques autres sites (Fougères, Vitré, Châteaugiron) ont été scrutés plus succinctement ; d'autres, enfin, brièvement. Les exemples examinés sont néanmoins assez nombreux (fig. 1) pour aboutir à des conclusions solides… à l'image même des pierres.
1 - Saint-Malo
« Des villes hautes s'éclairaient sur tout leur front de mer, et par de grands ouvrages de pierre se baignaient dans les sels d'or du large »
« Amers », Saint-John Perse
Par suite de leur coloration variée dans l'espace et de leur étalement prolongé dans le temps, les ouvrages défensifs de Saint-Malo (château, tours, remparts, couronne de forts insulaires…) ont nécessité une énorme masse de pierres de construction qui confèrent à la cité, en même temps que son cachet majeur, son charme indéniable. Les unes sont d'origine toute proximale, telles les migmatites du dôme métamorphique dit de Saint-Malo (dérivant de la fusion différentielle des gneiss), parcourues par des veines pegmatitiques (ou granite à gros grain), et les innombrables filons de dolérite vert sombre, offrant une altération en boules ; les autres sont de provenance plus distale : platins de granite feuilleté de Saint-Cast livrant des dalles estimées ; granites divers : Le Colombier, Chausey, Languédias (gris à beige), de Lanhélin (bleuté), de la Rance (avec ses enclaves de roches métamorphiques et de quartz), de Louvigné... ; grès d'Erquy (rose à rougeâtre) ; quartz… (Lespagnol (dir.), 1984 ; Laurent, 1986 ; Foucqueron, 1999, 2008 ; Chauris, 2011).
Les restes du mur gallo-romain de la Cité d'Alet en moellons, offrent une nette hétérogénéité pétrographique, suggérant l'emploi du « tout-venant » : migmatite et granite migmatitique, pegmatite, dolérite, quartz blanc, quartz bleuté… – l'ensemble dévoilant une étonnante palette colorée (photo 1).
Photo 1 - Saint-Malo. Mur gallo-romain d’Alet
Appareillage en opus incertum, diversité pétrographique et chromatique : migmatite et granite migmatitique, dolérite, quartz blanc, quartz bleuté, entre autres.
Crédit photo : L. CHAURIS, 2010
Le château dessine en plan un quadrilatère irrégulier, flanqué aux angles d'une grosse tour (La Générale, Quic-en-Grogne, des Dames et des Moulins) et prolongé vers l'est par un éperon rectangulaire ; le donjon s'élève dans la partie sud-ouest de la cour intérieure (photo 2). Les principaux travaux au XIVe siècle (courtine ouest…), aux XVe-XVIe siècles (les quatre tours et les trois autres courtines), au XVIIe siècle (L'éperon) ont nécessité un fort volume de roches de nature diverse, tant en moellons qu'en pierres de taille (l'épaisseur des murailles atteint sept mètres dans la tour Quic-en-Grogne!).
Photo 2 - Saint-Malo. Tour Quic-en-Grogne, vue du Grand Donjon
Pierres de taille en migmatites et granite de Chausey, platin de Saint-Cast utilisé en appui d’ouverture.
Crédit photo : L. CHAURIS, 2010
• Migmatites. Comme on pouvait s'y attendre, ces roches proximales ont ici un impact essentiel, soit en moellons (courtine ouest…), soit en pierres de taille (Grand Donjon, tour Quic-en-Grogne, muraille à l'ouest de la tour des Dames, tour des Dames…). Les migmatites sont parfois très érodées (embrasures du Grand Donjon…).
• Dolérites. Rares, en éléments à peine façonnés (courtine occidentale).
• Platin de Saint-Cast. En éléments sporadiques dans la courtine occidentale ; dans la tour Quic-en-Grogne en appui d'ouverture. Très fréquents dans le Grand Donjon (pour bancs dans les embrasures ; au quatrième étage dans les murs en moellons plats de grande dimension, érodés selon la schistosité ; dallage du chemin de ronde, appui et linteau d'ouverture, corniche intérieure ; marches d'accès à la tourelle du guet) ; dans la tour La Générale, appui d'ouverture dépassant un mètre de long…
• Granite de Chausey. En pierres de taille dans la tour Quic-en-Grogne.
• Granite de Lanhélin. En pierres de taille dans une poterne (tardive, à présent obturée, percée dans la muraille près de la tour des Dames).
Les remparts qui entourent la cité depuis le XIIe siècle ont subi une succession de transformations et d'agrandissements, en particulier dans la première moitié du XVIIIe siècle, connus alors sous la dénomination d' « accroissement ». À cause des remplois partiels, il est aujourd'hui parfois assez difficile de rattacher à telle ou telle période les pierres utilisées ; toutefois, dans certains secteurs, des remparts et spécialement les portes permettent des annotations lithologiques datées. La construction des remparts qui s'étire sur plus de 1 500 mètres et dont l'épaisseur dépasse quelquefois six mètres, a exigé, comme pour le château, un volume considérable de matériaux.
• Les migmatites, d'extraction proximale, qui affleurent localement à la base même des murailles (près de la poterne d'Estrées), sont omniprésentes, souvent en moellons hétérométriques, irrégulièrement assisés. Les gneiss migmatitiques sont fréquemment corrodés, de manière différentielle ce qui révèle nettement leur foliation ; les faciès granitiques (dits d'anatexie) ont pu être façonnés en pierres de taille (pour partie la porte Saint-Pierre). La dolérite, en galets, a parfois été utilisée telle quelle (rue de Chartres).
• Les platins de Saint-Cast sont localement abondants dans les murailles entre le bastion Saint-Philippe et la porte de Dinan. Plus souvent cependant, ils restent disséminés, en association avec des migmatites au sein desquelles leur teinte claire les distingue de loin. La pierre de Saint-Cast a été aussi recherchée comme dallage au-dessus de la porte de Dinan (photo 3), localement sur la courtine entre la porte Saint-Thomas et le fort de la Reine. Entre la tour Bidouane et la porte des Champs Vauverts, le couronnement du parapet des remparts est en beaux éléments de platins plus ou moins tapissés de lichen orange (Xanthoria parietina).
Photo 3 - Saint-Malo. Porte de Dinan, ouverte dans les remparts côté sud
Elle se caractérise particulièrement par l’emploi du platin de Saint-Cast, un gneiss clair à grain fin propre à être débité en dalles épaisses, dans sa partie supérieure.
Crédit photo : L. CHAURIS, 2010
• Le granite de Chausey est utilisé en pierres de taille. Dans le bastion Saint-Philippe, il forme les trois assises du soubassement et les chaînes harpées. Il constitue le chaînage d'angle du bastion Saint-Louis. Dans la Grande Porte, il est façonné en beaux éléments assisés dont la teinte oscille du gris au brunâtre ; la même roche a été également recherchée pour des mâchicoulis, pour la porte d'accès à la tour Bidouane, pour le parapet du bastion de Hollande où il présente de nombreuses taches rouillées…
• Le granite de La Colombière a été reconnu localement dans la porte Saint-Vincent (1709).
Dans les remparts, le granite de Lanhélin est d'emploi plus tardif que toutes les roches citées précédemment. La restauration de la Grande Porte a fait appel pour partie à ce matériau : le linteau d'une des portes de la tour, façonné en ce granite montre le millésime 1808. Le même granite a été mis en œuvre pour le dallage de la courtine des remparts entre la Grande Porte et les abords de la porte Saint-Louis, puis sur la courtine en direction de la porte de Dinan. Il a été utilisé pour la poterne jouxtant la porte de Dinan. Le couronnement du parapet de la porte des Bés est manifestement lié à une restauration récente…
• Le grès d'Erquy est localement en pavés sur les remparts.
La Tour Solidor, érigée sur un pointement rocheux à l'embouchure de la Rance et remontant au XIVe siècle, offre encore des substructions gallo-romaines. Les murailles de la forteresse médiévale – en fait constituée de trois tours – sont édifiées en gneiss migmatitiques, en granite d'anatexie, en granite de la Rance (avec enclaves de quartz et de roches métamorphiques), très localement avec des dolérites. Les parements vus des murs de l'escalier intérieur sont en migmatite façonnée en pierres de taille à contour curviligne. Les marches monolithes de l'escalier sont en granite fin de Languédias, dont on doit souligner ici l'utilisation tant précoce que distale. À l'intérieur de la tour, les migmatites sont localement très corrodées, probablement par suite de l'humidité. L'appui des meurtrières du chemin de ronde a recherché les platins de Saint-Cast. Le pavage d'accès à la tour a utilisé des galets de dolérite, de quartz et même de silex… Au total, la Tour Solidor montre la mise en œuvre concomitante de pierres locales et lointaines (Languédias) ; ce dernier point souligne – avec la qualité architecturale – la richesse des bâtisseurs.
Le fort de la Cité d'Alet, qui abrite aujourd'hui le « Mémorial 39-45 », a été en partie défiguré par les installations allemandes, ici d'une ampleur assez exceptionnelle. La construction de l'ancien fort sous la direction de l'ingénieur Mazin, remonte au début de la seconde partie du XVIIIe siècle. Les vestiges de cette époque, qui demeurent encore imposants, font actuellement l'objet d'une restauration. Les pierres utilisées dans le passé sont, d'une part les migmatites locales (pierres de taille et moellons) et, plus rarement, les pegmatites, d'autre part le granite de Lanhélin (encadrement d'ouvertures). Lors des travaux de restauration, la grande porte d'entrée a été reconstruite en béton, qui, de loin, mime quelque peu le granite, mais dont la teinte jaunâtre, inhabituelle, laisse rêveur. Les chaînages d'angle des bastions sont réparés avec le granite de Languédias, dont la teinte trop claire s'harmonise assez mal avec le reste de l'édifice. Le granite « roux de Mégrit », dans le même massif de Dinan, eût beaucoup mieux convenu…
La guirlande insulaire de forts demanderait, à elle seule, de longs développements sous l'angle lithologique. On se borne ici à quelques annotations succinctes sur trois ouvrages.
• Le Fort National a été érigé sur les rochers de l'Islet, sur les plans de Garangeau, à partir de 1689, avec diverses modifications jusqu'en 1743. Les murailles à fruit accusé sont flanquées au sud par deux avant-corps encadrant la porte d'entrée monumentale en retrait. Le dispositif défensif a été complété tardivement, en 1849, par un mur de fusillade protégeant les flancs sud et ouest.
Le granite de Chausey, en pierres de taille, a été mis en œuvre dans la porte d'entrée, les chaînages d'angle, le couronnement du parapet … ; les migmatites, locales, en moellons, dans les murailles ; les platins de Saint-Cast, en dallage et couronnement de murette ; le grès d'Erquy, en pavage devant le casernement. Le couronnement du parapet de l'enceinte extérieure, tardive, a fait appel au granite de Lanhélin en grands éléments remarquablement façonnés. Le pavage d'accès au fort associe migmatite, dolérite et platins. Les travaux récents de restauration partielle des embrasures ont utilisé le clair granite de Languédias ; la toiture de l'édicule située à l'un des angles de la cour centrale est en ardoises de Sizun (Finistère).
• Le Petit Bé a été également construit par Garangeau à la fin du XVIIe siècle. Les murailles présentent un fruit prononcé. La face orientale est accostée de deux bastions en avant de l'accès au casernement ; à l'ouest, l'ouvrage se prolonge par une vaste batterie en fer à cheval avec une échauguette à son extrémité.
L'accès au fort s'effectue en partie par des marches grossièrement taillées dans les migmatites (parcourues par des lentilles de pegmatites à muscovite et tourmaline) qui forment le substratum de l'édifice. Comme au Fort National, appel a été fait pour la pierre de taille au granite de Chausey (chaînages d'angle, entrée, couronnement du parapet du fer à cheval, escalier à vis…), tandis que les moellons des murailles proprement dites sont en migmatites, et le dallage en platin de Saint-Cast. Les récents travaux dans les embrasures du fer à cheval ont utilisé le granite extrait des boules de surface du massif de Louvigné en Ille-et-Vilaine.
• Aujourd'hui quelque peu isolé au milieu des infrastructures portuaires, le fort du Naye (1843) est édifié sur des migmatites (avec lentilles de pegmatites) qui forment une partie importante de l'escarpe, prolongée vers le haut par la muraille en moellons de même nature. L'entourage d'une porte à cintre surbaissée est façonné dans le granite bleu de Lanhélin ; de même qu'à l'une des extrémités de l'ouvrage, le couronnement d'un mur et une énorme borne.
2 - Châteaugiron
La construction de cet impressionnant ensemble, fort complexe, s'est échelonnée du XIIe siècle (parties les plus anciennes de la chapelle) au XVe siècle : donjon isolé (XIIIe s., remanié à la fin du XIVe s.), tour de l'Horloge (fin XIVe s.), tour du Guet (XVe s.), avant d'être partiellement mais profondément transformé au XVIIIe siècle (Mauger, 1991). Il est aujourd'hui propriété de la commune. L'ouvrage a nécessité un énorme volume de pierres… Mais leur nature et leur provenance ont peu retenu l'attention… et, parfois, de manière erronée ou imprécise.
• Schistes briovériens
Toute la région est occupée par ces roches qui affleurent localement au pied même du château où elles sont très redressées. La masse essentielle de la forteresse médiévale a fait appel à ces schistes, ici omniprésents. Ce matériau a été employé en moellons, le plus souvent hétérométriques, plus ou moins allongés, voire plats, de façonnement rendu difficile par la schistosité. Leur nuance varie du bleu au gris-vert. Les seules surfaces planes des parements correspondent à des diaclases (cassures naturelles), colorées en brunâtre par l'hydroxyde de fer déposé par les eaux circulant dans ces fissures. Leur degré d'induration est varié. En fait, le seul atout de ce matériau ingrat – et il s'avérait essentiel pour bâtir une telle forteresse – reposait sur son abondance inépuisable à proximité de l'ouvrage. Sa monotonie est atténuée par son association locale avec d'autres roches.
• Schistes cambriens
Ces roches diffèrent totalement des schistes briovériens précités, non seulement par leur âge plus récent (ils se sont déposés après l'arasement de la chaîne cadomienne, qui avait redressé les dépôts briovériens), mais aussi par leur teinte rougeâtre accusée et leur degré d'induration permettant d'obtenir de longs moellons plats. Dans le château, ils ont été utilisés localement en alternance avec des assises de schistes briovériens en éléments de dimension nettement inférieure.
• Microgranite
Dans la forteresse médiévale, cette roche filonienne, de nuance jaunâtre, avec cernes brunâtres d'hydroxyde de fer, a été mise en œuvre avec parcimonie. Dans le donjon, elle forme quelques assises en pierres de taille à la rupture d'inclinaison du fruit de la tour ; assises également peu épaisses dans deux autres tours ; dans l'arc voûté en plein cintre de la porte à la base de la tour de l'Horloge, en alternance avec la pierre des landes (infra). Par contre, dans le bâtiment du XVIIIe siècle, ce même microgranite a été très largement employé en beaux moellons équarris, associé au granite mancellien en pierres de taille.
• Pierre des landes
Ce conglomérat est constitué de fragments anguleux de diverses roches, en particulier de quartz, cimentés dans une matrice rouge sombre à noir bleuâtre d'hydroxyde de fer. À l'inverse des autres roches précitées, son origine est récente et superficielle : il forme des placages sur un substratum riche en fer dans la « nappe de battance » des géographes. Cette pierre, fort curieuse, était très recherchée dans le passé du fait de sa présence en surface – ainsi directement exploitable – et des facilités de son façonnement qui demeure toutefois assez irrégulier par suite de sa granulométrie anarchique. Dans le château, elle a été utilisée dans les parties les plus anciennes (contreforts de la chapelle…), soit seule, soit en association avec les schistes briovériens. Comme déjà signalé, elle a été aussi employée en alternance avec le microgranite dans le cintre d'une porte à la base de la tour de l'Horloge, dénotant un souci esthétique indéniable.
• Granite
Comme on pouvait s'y attendre, vu son absence totale dans la région, le granite, en provenance du batholite mancellien, est rare dans le bâti médiéval : bandeau dans une des tours, montants d'un passage voûté… Inversement, cette roche est largement mise en œuvre, en pierres de taille, au XVIIIe siècle, tant pour les chaînages d'angle que les encadrements des ouvertures. Elle semble avoir été également employée à la même époque pour des ouvertures pratiquées dans la vieille forteresse. À cette date, les bâtisseurs fortunés n'hésitaient pas à s'affranchir du handicap de la distance.
3 - Fougères
Aux confins nord-est de l'Ille-et-Vilaine, aux marches de Bretagne, à proximité de la bordure d'un vaste pluton mancellien intrusif dans les schistes briovériens, le château de Fougères, remanié à différentes reprises, est une superbe illustration de l'architecture militaire médiévale ; les tours étonnent par leur nombre (13 !) et leur diversité. Deux roches différentes, de provenance locale, ont été essentiellement mises en œuvre.
Les « cornéennes » – résultant du métamorphisme des schistes briovériens au contact du granite – en moellons hétérométriques, disposés à plat dans les parements des murailles et localement associés à des moellons de quartz blanchâtre (parcourant les cornéennes) ; à l'intérieur des murailles, elles sont utilisées en éléments de blocage ; elles sont également employées en arc de décharge. Au total, les cornéennes, qui affleurent sur place, représentent la masse principale des matériaux pierreux (photos 4 et 5).
Photo 4 - Vue du château de Fougères avec ses nombreuses tours
L’utilisation massive des cornéennes d’origine locale, issues du métamorphisme de contact des schistes briovériens, tranche avec celle du granite local, en encadrement des meurtrières ou pour les mâchicoulis.
Crédit photo : L. CHAURIS, 2013
Photo 5 - Château de Fougères
Muraille en moellons de cornéennes hétérométriques, associées à quelques quartz blanchâtres.
Crédit photo : L. CHAURIS, 2013
Le granite qui apparaît au nord de la cité a été nettement moins recherché : en bandeaux rompant la monotonie des élévations ; en encadrement des meurtrières ; en entourage des portes ; pour les mâchicoulis ; pour les marches d'escalier…
4 - Vitré
Erigée aux marches de Bretagne comme Fougères, Vitré est souvent comparée à cette ancienne cité (Mussat, 1975). Ici aussi, les ouvrages défensifs s'avèrent du plus vif intérêt pour nos propos (Chauris, 2006 a et 2006 b). Cet ensemble, fort complexe, constitue un remarquable exemple de l'architecture militaire des XIIIe et XVe siècles, avec des restaurations tardives. Son curieux contour triangulaire reflète la morphologie de l'éperon schisteux orienté vers l'ouest entre la vallée de la Vilaine et un de ses affluents.
Plusieurs roches différentes ont été mises en œuvre, le grès gris-beige et le schiste bleu-noir de Vitré, tous deux d'extraction proximale ; le granite du batholite mancellien ; les autres roches (tuffeau…) restent rares.
Château
• Grès de Vitré
Dans le château, cette belle roche claire a été recherchée pour partie, tant lors de la construction (où elle est souvent en concurrence avec les schistes bleu sombre) que lors des travaux de restauration (dans ce dernier cas, pour la série de piliers et arcades d'un des côtés de la cour ; ici un seul pilier, à l'une des extrémités, paraît avoir été conservé en l'état : photo 6). En plusieurs points, le grès présente une élégante texture zonée, due aux cernes, très rapprochés, formés d'hydroxyde de fer. Dans l'élévation de la tour de l'Argenterie (côté cour), les moellons gréseux sont nombreux, mais la porte d'entrée et l'escalier sont en schiste. En fait, les grès (le Châtelet ; porte d'accès, sur la courtine, à la tour de l'Argenterie…) demeurent souvent sporadiques, beaucoup plus qu'on aurait pu le penser à priori. L'une des raisons de cette relative rareté est sans doute due à la situation même du château, érigé sur les schistes qui pouvaient fournir sur place au moins une partie des matériaux.
Photo 6 - Château de Vitré
Dans la cour du château, un pilier en grès, épargné lors des travaux de restauration. Ce grès de teinte gris-beige, d’origine proximale comme le schiste bleu-noir qui donne sa tonalité d’ensemble à l’édifice, présente une texture zonée caractéristique.
Crédit photo : L. CHAURIS, 2002
• Schistes de Vitré
C'est à cette roche bleu foncé, utilisée seule (ou en association avec grès et granite), que le château de Vitré doit sa sombre tonalité. Les exemples de mises en œuvre sont si nombreux que seuls quelques-uns sont évoqués. La porte ogivale d'entrée dans la tour Saint-Laurent est en schiste bleu ; la muraille de l'escalier dans ladite tour offre un large emploi de ces mêmes schistes qui conservent encore les traces d'outils ayant servi à leur façonnement, au demeurant difficile. Le mur intérieur du chemin de ronde de la même tour montre aussi le schiste, en grands éléments, avec traces d'outils. Cette roche forme également les meneaux d'une fenêtre au niveau de la courtine au-dessus des arcades de la cour.
• Schiste et granite
Fréquemment, le schiste de Vitré est associé au granite mancellien. Le cas s'est présenté à l'époque de la construction du château. Dans le Châtelet, les deux roches sont juxtaposées de façon aléatoire, alors que le contraste de coloration eût permis un agencement décoratif. Une telle association, en alternance régulière, a toutefois été mise en œuvre dans une porte d'entrée, mais un tel souci esthétique demeure exceptionnel. En règle générale, les deux roches, parfois également associées au grès, sont utilisées dans le plus grand désordre.
Les données archivistiques sur la localisation précise des sites d'extraction granitique au Moyen Âge restent très rares. On peut, néanmoins, citer un texte de 1420. Il s'agit, en l'occurrence, d'un cahier des comptes conservé à la bibliothèque de Vitré (Mussat, 1975), indiquant un lot de « pierre de grain » (granite) extrait à Tiercent, dans le massif mancellien de Fougères, à une trentaine de kilomètres de Vitré. Assez malencontreusement, le granite (en provenance d'Elven [Morbihan] ?) a été utilisé avec profusion lors des travaux de restauration de la tour Saint-Laurent, détruisant l'harmonie du bâti originel...
• Tuffeau
Le tuffeau du Val de Loire a été recherché pour l'absidiole en forme de loggia (première partie du XVIe siècle) de la chapelle de l'Oratoire. Mais ce matériau qui offre une aptitude à la sculpture, supérieure au grès de Vitré, ne résiste pas aux vicissitudes du climat océanique.
Remparts
Une partie de l'enceinte médiévale, avec ses tours, ses remparts et ses portes, a été sacrifiée. Restent encore toutefois d'impressionnants vestiges de fortifications ; à l'ouest, les remparts coïncident avec les hautes murailles du château. Les deux pierres locales (grès clair et schistes sombres de Vitré) ont été largement mises en œuvre, sous forme de moellons hétérométriques. Cependant, dans certains cas, les grès sont nettement dominants, les schistes ne formant que quelques assises espacées (tour à section rectangulaire). Dans d'autres cas, les schistes constituent l'essentiel de l'élévation (tour demi-circulaire en petits moellons disposés à plat). La tour de la Bridole, dans la section est de la ville-close, montre des moellons schisteux pouvant atteindre un mètre de long. Mais souvent aussi, les deux pierres sont associées sans ordonnance particulière (avancée à section triangulaire), ou, au contraire, avec une certaine recherche esthétique (poterne Saint-Pierre). La tour d'En-Bas est une restauration remontant seulement à une centaine d'années ; le parement a fait un très large appel au grès.
5 - Dol-de-Bretagne
Située sur un éperon rocheux à la limite médiane des immenses marais colmatant le fond de la baie du Mont-Saint-Michel, Dol-de-Bretagne, ancienne cité épiscopale dont elle conserve toujours la fière cathédrale, apparaît aujourd'hui quelque peu assoupie, entourée de ses remparts ponctués de treize tours, qui la parent d'un charme indubitable. La ville et ses abords ont fait l'objet de nombreuses publications (Duine, 1911 ; Amiot, 1984-1986, 2017 ; Leguay, 2001 ; Chartier, 2017) et les connaissances historiques sont sans cesse enrichies dans la belle revue Le Rouget de Dol. Toutefois, sauf exceptions, les données sur les roches mises en œuvre restent assez parcimonieuses.
Les pierres ne manquent pas à proximité (Bogdanoff et Julien, 1996) (fig. 2) :
• Le sous-sol de la ville elle-même est constitué par un complexe d'âge briovérien formé d'alternances silto-grauwackeuses pouvant livrer des moellons. Au contact des granites (infra), ces formations sont métamorphosées en schistes tachetés et en cornéennes à biotite et cordiérite.
• Trois intrusions granitiques toutes d'âge cadomien affleurent à proximité : au nord, le leucogranite du Mont-Dol, gris clair à blanchâtre ; à l'est, la granodiorite de Saint-Broladre, de nuance grisâtre ; au sud, enfin, la granodiorite de Lanhélin, bleutée.
• Toutes ces roches sont recoupées par des filons subméridiens de dolérites, d'âge dévonien supérieur - carbonifère inférieur, de teinte verdâtre, s'altérant en boules très tenaces.
La position de Dol à proximité des Marches frontalières entre Bretagne et Normandie, ainsi que des approches de la mer d'où pouvait surgir l'ennemi, explique l'édification d'une impressionnante enceinte, encore en grande partie conservée ; la ville servait à la fois de poste d'observation et de refuge.
En fait, les ouvrages défensifs apparaissent aujourd'hui comme une succession de constructions, de destruction et de reconstruction s'échelonnant au Moyen Age, véritable corset de pierres nécessitant des réparations fréquentes. Les chantiers exigent l'exploitation d'anciennes carrières, l'ouverture de nouvelles carrières, pour l'obtention tant des pierres de taille que des « pierres froides » (moellons).
À notre connaissance, pas de précisions sur la provenance des pierres mises en œuvre. Mais tout laisse à penser que, comme pour la cathédrale, appel a été fait aux trois massifs précités (Mont-Dol, Saint-Broladre, Lanhélin), auxquels s'adjoignent les schistes tout proximaux, l'ensemble entraînant des contrastes de coloration où l'esthétisme architectural s'associe aux impératifs économiques.
6 - Le Grand Fougeray
Le Grand Fougeray doit sa célébrité à la majestueuse tour du Guesclin (XIIIe-XVIe siècles), remarquablement restaurée. Le sous-sol régional est formé par le Grès armoricain (étage Arenig), limité au nord et au sud par les schistes d'Angers (étage Llandeilo1). Les granites font défaut dans toute la région.
La haute muraille de la tour a recherché, sous forme de moellons, le Grès armoricain, tout proximal, portant encore, localement, des traces de « ripple-marks » (rides de plage), indiquant son origine marine (photo 7). La porte d'entrée a mis en œuvre un granite à grain fin, orienté, de teinte claire, de provenance inconnue, mais certainement distale. Présence, également, de calcaire, d'origine imprécisée.
Photo 7 - Le Grand Fougeray. La tour du Guesclin, principalement constituée du grès armoricain, d’origine proximale
Crédit photo : L. CHAURIS, 2013
7 - À Hédé, un imposant donjon ruiné. À Bécherel, remparts et donjon
Les ruines du château médiéval de Hédé (XIe-XIIe siècles – fin XIIIe-début XIVe siècles) s'élèvent sur un éperon rocheux à la bordure septentrionale du granite de Bécherel. Ce massif granitique constitue l'un des plutons de l'immense batholite mancellien mis en place vers la fin de l'orogenèse cadomienne (fig. 3). Il présente un allongement est-ouest, démesuré (près de 30 km) par rapport à sa largeur (souvent de 2 à 3 km seulement) ; ultérieurement, il a été modifié par le passage de l'accident linéamentaire médio-armoricain qui se traduit entre autres par sa cataclase (ou bréchification) et la formation de puissants filons quartzeux, également orienté est-ouest. Il offre une texture à grain moyen, avec biotite, cordiérite pinitisée, pyrite disséminée et petites enclaves schisteuses du Briovérien. L'altération météorique se traduit par une teinte brunâtre due à la diffusion d'hydroxyde de fer (limonite), qui n'a pu que s'accentuer dans les constructions pluriséculaires.
Figure 3 - Place du granite de Bécherel vers l’extrémité occidentale de l’immense batholite mancellien (Jonin, 1981)
En dépit de ses aptitudes architectoniques médiocres (teinte brunâtre peu agréable, cataclase, fréquence des enclaves…) le granite de Bécherel a été activement recherché dans le passé (fig. 4). L'église Notre-Dame à Hédé reste encore aujourd'hui, en dépit de ses remaniements plus récents, la plus grande église romane d'Ille-et-Vilaine. Sa construction à une époque reculée explique à la fois l'utilisation du granite local, très largement mis en œuvre, et son degré d'altération avancée (Chauris, 2010). Les mêmes remarques peuvent être effectuées sur le donjon de Hédé, où l'on notera les fortes dimensions des pierres de taille régulièrement assisées.
Figure 4 - Édifices religieux ayant fait appel, au moins pour partie, au granite de Bécherel (Chauris, 2010)
Les vestiges médiévaux des remparts de Bécherel sont encore bien visibles en bordure de la rue Saint-Michel, sur environ 300 mètres. Subsiste aussi le donjon, aujourd'hui délabré. Comme il était prévisible, ces ouvrages avaient mis en œuvre le granite local, de nuance brunâtre, en moellons hétérométriques assez grossièrement assisés, à la différence des pierres de taille en grand appareil du donjon de Hédé.
8 - Montfort-sur-Meu
Né sur une butte au confluent du Garun avec le Meu, situation que reflètent ses appellations successives, Monfort, de la cité médiévale à la sous-préfecture déchue, conserve de son passé, malgré des destructions regrettables, de nombreux vestiges : entre autres, pour nos propos, la haute tour Papegaut (fin du XIVe siècle) et des restes de remparts.
Montfort est situé vers la bordure septentrionale du « Pays pourpre » qui lui a fourni, avec surabondance, des matériaux de construction. Ces dépôts rougeâtres sont fort anciens : ils remontent au début des temps primaires et résultent de l'érosion de la chaîne cadomienne dont la formation s'est échelonnée entre 650 et 540 millions d'années. La discordance de ces séries rouges sur les terrains schisto-gréseux du Briovérien plissés lors de l'orogenèse cadomienne est soulignée par le dépôt d'un conglomérat, dénommé précisément « poudingue de Montfort », à galets quartzeux blanchâtres infra- à pluricentimétriques, dans une matrice gréseuse rougeâtre très sombre. Ces poudingues sont interprétés comme une sédimentation de type deltaïque dans la mer paléozoïque au pied des montagnes cadomiennes en cours d'érosion. Ils sont associés à des grès rouges et surmontés par des schistes rouges (« siltites » des géologues). L'origine de la teinte rouge accusée de ces dépôts est à rechercher dans les processus d'altération météorique du type latéritique (rubéfaction) affectant les terrains briovériens émergés.
Ces roches rouges locales ont été recherchées très tôt à Montfort ainsi que l'attestent les parties de l'enceinte médiévale qui ont échappé aux démolitions. Dans l'altière tour du Papegaut, donjon, puis prison, aujourd'hui écomusée, les pierres sont généralement en grands éléments allongés, régulièrement assisés (photo 8). Dans les remparts, près de la tour des Pas-d'Ane, les grès, dominants, sont associés avec poudingues ici subordonnés, en moellons hétérométriques.
Photo 8 - Montfort-sur-Meu. La tour Papegaut, formée des roches rouges locales
Crédit photo : L. CHAURIS, 2014
9 - Boutavent
Situé dans la commune d'Iffendic, le château de Boutavent est implanté en bordure d'un éperon rocheux de schistes pourprés du Paléozoïque inférieur. Mentionné depuis le début du XIIIe siècle, il était en ruines au XVIe siècle et est, à présent, presque complètement arasé. L'ensemble, qui s'étend sur environ 6 500 m², est constitué principalement par une haute-cour à enceinte triangulaire et d'une basse-cour grossièrement quadrangulaire. (Leprêtre et Corre, 2016).
Appel a été fait au schiste pourpré proximal. Ainsi, les vestiges de la courtine est sont formés de médiocres moellons de tels schistes posés à plat. Ces schistes offrent de magnifiques affleurements dans la basse-cour. En cours de fouilles, Boutavent présente un exceptionnel potentiel archéologique.
10 - Le Lou-du-Lac
Le site est caractérisé, géologiquement, par la présence d'un dépôt de calcaire tertiaire dans un petit bassin d'effondrement, exploité sous le nom de « sablon » pour l'amendement des sols acides et, aussi, pour la construction, sous le nom de « pierre de jauge ». Le socle ancien est formé par les schistes briovériens ; il est recoupé au nord par le granite cadomien de Bécherel et recouvert, partiellement, au sud par le poudingue de Montfort et les schistes pourprés.
Quelques annotations succinctes sur les pierres mises en œuvre dans le château, en partie ruiné, dont le polylithisme reflète l'appel aux pierres plus ou moins distales : prédominance des schistes briovériens tout proximaux ; poudingues de Montfort utilisés du fait de leur résistance à l'érosion (marche de chaque côté de l'escalier du perron, ainsi que pour le pilier d'entrée) ; calcaire coquillier mis en œuvre dans le chemin de ronde de la vieille tour.
11 - Montauban-de-Bretagne
Le château de Montauban, remontant pour l'essentiel aux XIIIe, XIVe et XVe siècles, offre un plan approximativement pentagonal avec tours d'angle et châtelet. Il est édifié à proximité d'une ancienne carrière calcaire d'âge tertiaire. « Selon une tradition locale, c'est à cette pierre blanchâtre, désignée en latin sur le nom de montem albanum (la colline blanche), que la ville de Montauban devrait son nom » (Meirion-Jones et al., 2016). Le socle de toute la région est constitué par les formations schisteuses du Briovérien, et il faut remonter nettement plus au nord pour rencontrer du granite (Bécherel, d'âge cadomien, Dinan-Languédias, d'âge hercynien). Localement affleurent des dépôts pliocènes dits « roussards ».
Les schistes briovériens, tout proximaux, jouent un rôle essentiel dans le bâti. Ils sont plus ou moins bien façonnés et portent encore parfois des traces d'outils pour leur équarrissage. Les grès roussards, en moellons, restent sporadiques. La provenance des granites (sculptures, pierres de taille) n'a pu, à ce jour, être précisée avec certitude (Languédias ?).
12 - Saint-Aubin-du-Cormier
Les vestiges du château (avec son donjon) et de l'enceinte urbaine, ruinés, se dressent vers la limite des schistes briovériens, au nord, et des grès armoricains (Ordovicien) au sud, à quelques kilomètres seulement au sud de l'immense massif granitique de Louvigné fournissant d'excellentes pierres de taille. Les grès, en gros moellons blanchâtres, très résistants, ont joué un rôle essentiel dans le bâti, où ils sont accompagnés par le granite.
13 - Combourg
« La petite chambre perchée au sommet de la tour »
Chateaubriand
Le château de Combourg (du XIIe au XVe siècle), remarquablement restauré, est érigé sur les schistes briovériens, à égale distance (3,5 km) des granites cadomiens de Lanhélin au nord et de Dingé au sud (Barrois, 1893).
Il a été édifié en granite, tant pierres de taille remarquablement assisées que moellons trapus, sans qu'il soit possible toutefois de préciser le ou les sites d'extraction (Lanhélin et/ou Dingé) (photo 9).
14 - Rennes, Porte mordelaise
Reconstruite de 1442 à 1452, puis en 1486-1487, la Porte mordelaise – évoquant le bourg voisin de Mordelles – est un magnifique témoin des défenses de la cité médiévale rennaise (photo 10). Entrée principale dans la ville, c'est, en fait, un châtelet à deux tours avec mâchicoulis, et deux portes, l'une charretière, l'autre piétonne, chacune fermée par un pont-levis (Batt et Pichot, 2004).
Photo 10 - Rennes. La Porte mordelaise : pierres de taille en granite, moellons en schiste gréseux
Crédit photo : L. CHAURIS, 2016
Le sous-sol rennais s'avère l'un des plus ingrats de toute la Bretagne pour l'obtention des pierres de qualité ; cette pauvreté est encore aggravée par l'éloignement de la mer, empêchant des apports distaux par voie d'eau. Sur place, affleurent les schistes briovériens, indurés par de petits pointements d'âge cadomien. Aux environs, le « caillou de Rennes » résulte de la silicification superficielle d'âge éocène (Tertiaire) lors du climat tropical régnant alors en Bretagne.
Dans la Porte mordelaise, appel a été fait pour la pierre de taille au granite du batholite mancellien (et peut-être, aussi, au granite hercynien de Languédias?), les moellons sont en schistes gréseux du briovérien proximal, les pavés en caillou de Rennes.
15 - Redon
Édifiée à la limite atteinte par le flot du plus grand fleuve breton, La Vilaine, la cité – dont la tour romane de l'abbaye apparaît encore aujourd'hui comme le principal symbole – a éprouvé, très tôt, la nécessité d'être protégée par des remparts. Dans ce but, appel a été fait à des grès multicolores, à dominante rougeâtre qui affleurent largement juste à l'est. Plus précisément, il s'agit de grès schisteux régulièrement stratifiés, colorés dans toutes les nuances de rose au rouge, voire du violet au vert. L'érosion météorique souligne le litage sédimentaire. Cas assez exceptionnel, méritant d'être signalé, ces roches sont toujours exploitées dans la commune voisine, Avessac, au lieu-dit Le Pont, par la S. A. Les carrières Men Arvor, qui peuvent fournir, si nécessaire, des éléments pour les travaux de restauration. L'extraction du grès de Redon est très ancienne, comme l'attestent entre autres les remparts (Fourniguet et Trautmann, 1984 ; Pichot et Provost, 2015 ; Chauris, 2021).
(à suivre)