L’armature urbaine de la Loire-Atlantique

Résumé

Cet article propose une méthodologie de définition de l’armature urbaine de la Loire-Atlantique au regard de la croissance actuelle du département. L’effet de taille, premier indicateur de la polarité est défini à partir du poids de la population, des emplois, des surfaces commerciales, des commerces et services. L’article propose ensuite une mesure théorique de l’effet de centre brut et relatif pour l’emploi, les commerces, les services de santé, les services d’éducation, les services de sports et loisirs à travers un indice de localisation. à partir de ces indicateurs, différents types de communes sont identifiés : les villes, les bourgs-centres, les polarités périurbaines, les communes ordinaires. L’étude confirme la permanence des polarités malgré des phénomènes d’homogénéisation dans les régions littorales et périurbaines.

Index

Mots-clés

armature urbaine, polarités, Loire-Atlantique, organisation territoriale, centralité, commerce, emploi

Plan

Texte

En 2010, la Loire-Atlantique compte près de 1,3 million d’habitants. Depuis le recensement de 1999, le département a gagné presque 150 000 habitants dont un peu plus de la moitié grâce au solde migratoire et, d’ici 2030, ce sont 300 000 habitants supplémentaires qui pourraient y habiter. Cette croissance, qui a tendance à se diffuser sur une part grandissante des communes de Loire-Atlantique depuis les années 1990, s’accompagne d’un accroissement important des équipements et services présents dans chaque collectivité. En plus des transformations sociales et agricoles que connaît le département depuis une cinquantaine d’années (Renard, 2002), cette dynamique a-t-elle un impact sur l’organisation territoriale du département ?

L’armature urbaine s’est construite pendant la civilisation agraire, les commerces et services créant une hiérarchisation des lieux habités. Cette organisation a été théorisée par W. Christaller dans les années 1930 sous le terme de théorie des lieux centraux. Selon lui, la ville commerçante est à la fois un lieu de concentration et de consommation des richesses, ainsi l’armature urbaine se définit comme l’addition d’un effet de taille et d’un effet de centre.

Cette organisation du territoire est-elle toujours valable aujourd’hui dans une société post-industrielle en croissance ?

Pour répondre à cette question, nous avons élaboré une méthode de définition de l’armature urbaine d’un département. Dans un premier temps, nous analyserons l’effet de taille, puis l’effet de centre pour enfin montrer les résultats de l’analyse statistique à travers de nombreuses illustrations cartographiques.

1. L’effet de taille : premier indicateur d’une polarité

La mesure de l’effet de taille se fonde sur un indicateur déterminant le poids de chaque commune pour chaque élément constitutif d’une polarité : la population, l’emploi et l’équipement en commerces et services.

Le poids démographique

L’indicateur retenu est la population municipale légale en 2010 telle que donnée par l’INSEE. La carte no 1 montre la très forte représentation de la commune de Nantes avec près de 290 000 habitants. Avec plus de 65 000 habitants, Saint-Nazaire est beaucoup plus modeste et se rapproche de Saint-Herblain. Certaines communes se détachent également comme Châteaubriant (12 022 habitants), Pontchâteau (9 683 habitants), Ancenis (7 651 habitants), Pornic (14 101 habitants) ou encore Guérande (15 534 habitants) ou La Baule (16 044 habitants). L’élément frappant de cette carte reste la très forte concentration de la population dans la communauté urbaine de Nantes. Une zone moins peuplée se dessine également dans le Castelbriantais par rapport au sud du département. Ainsi Fercé ne compte que 485 habitants, Grand Auverné 805, Juigné-Les-Moutiers 353 et Mouais 388. Il existe donc un déséquilibre entre les campagnes du nord et celles du sud. Le nord du département, hors communauté urbaine de Nantes (CUN) et Saint-Nazaire, regroupe presque 400 000 habitants pour 128 communes tandis que le sud avec seulement 68 communes en compte presque 330 000.

Le poids de l’emploi

Pour mesurer la répartition de l’emploi, nous avons utilisé le nombre d’emplois au lieu de travail défini par l’INSEE au cours du recensement 2009 (carte no 2). La répartition de l’emploi est plus contrastée que celle de la démographie. Le poids de Nantes est écrasant avec 165 000 emplois. Saint-Nazaire et Saint-Herblain suivent avec plus de 35 000 emplois chacune. Ancenis (10 305 emplois) tout comme Châteaubriant, Guérande ou encore Pornic (respectivement 8 561, 7 055 et 6 211 emplois) constituent un échelon secondaire. Ici encore les communes périurbaines autour de Nantes et de Saint-Nazaire, bénéficient d’un poids important. La différenciation nord-sud à l’intérieur du territoire de Nantes Métropole hors Nantes est ici moins marquée : on compte même environ 40 000 emplois au nord de la CUN qui correspondent essentiellement aux emplois de Saint-Herblain et Carquefou. Pour l’ensemble du département, la moyenne d’emplois par commune est équivalente à 1 000 emplois. Plus localement de petites concentrations apparaissent comme à Guéméné-Penfao (1 492 emplois) ou Machecoul (3 947 emplois).

Le poids des commerces et services

Deux sources principales sont utilisées : les données de l’observatoire du commerce de la CCI et la Base Permanente des Équipements de l’INSEE (BPE). Les surfaces commerciales en 2010 en m2 fournies par la CCI permettent de mesurer la répartition du commerce sur le territoire (carte no 3).

Figures 1 à 3 – Effet de taille en Loire-Atlantique

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La Base Permanente des Équipements de l’INSEE permet d’affiner les résultats en s’intéressant au volume et à la diversité des commerces et services. Les éléments programmés dans les contrats de territoire départementaux du Conseil général pour les périodes 2013-2015 et 2009-2012 ont été rajoutés à la Base Permanente des Équipements de 2011 pour intégrer les équipements à venir.

Parmi l’ensemble des 168 variables de la Base Permanente des Équipements, une sélection a été faite afin de ne garder que les indicateurs définissant une polarité (suppression des catégories mobiles comme les maçons par exemple). Par ailleurs, les catégories « Piscines municipales » et « Théâtres et salles de spectacles » ont été réévaluées à partir de l’annuaire pour mieux correspondre à la réalité du territoire. Au final, 86 variables ont été retenues. Ces variables ont été réparties en quatre catégories : commerce, santé, éducation et sports et loisirs.

Chaque équipement a été pondéré afin de tenir compte de leur rareté : 1 point pour ceux présents dans plus de 70 % des communes ; 2 points pour 50 % à 69 % des communes ; 3 points pour 30 % à 49 % des communes ; 4 points pour 10 à 29 % des communes et 5 points pour moins de 10 % des communes. On obtient donc l’indicateur « BPE en points pondérés » pour les commerces, la santé, l’éducation, les sports et loisirs. Chaque indicateur est illustré dans les cartes no 4 à no 7.

Pour chaque indicateur, c’est toujours Nantes qui obtient la plus grande concentration suivie par Saint-Nazaire. Pour les niveaux inférieurs, des variations apparaissent selon l’indicateur pris en compte.

La carte no 3 des surfaces commerciales illustre bien le poids des zones commerciales en périphérie des villes : Saint-Géréon près d’Ancenis ou Trignac près de Saint-Nazaire par exemple. Ce phénomène se retrouve également à proximité de Nantes.

Néanmoins, sur la carte no 4 qui prend en compte les points BPE, les concentrations sont moindres pour les communes périphériques tandis que le littoral semble plus visible (543 points à Saint-Sébastien, 758 à Pornic).

Sur la carte no 5, les services de santé apparaissent comme les plus concentrés avec, en parallèle de zones très bien équipées, des espaces très peu voire pas du tout équipés (par exemple Puceul ou Soulvache n’ont aucun équipement ou service de santé).

Les services d’éducation de la carte no 6 font apparaître des communes bien équipées en milieu rural comme Blain ou Nozay qui bénéficient d’équipements plus rares comme les lycées agricoles par exemple. Néanmoins Nantes reste de loin la ville la mieux équipée (775 points). La carte no 7 représentant les services de sports et de loisirs montre que ce sont les plus équitablement répartis sur le territoire.

La mesure d’un effet de taille reste finalement assez simple, il devient plus compliqué d’analyser la centralité.

Figures 4 à 7 – Poids des commerces et services en Loire-Atlantique

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L’effet de centre : indicateur d’un rayonnement

Les sources pour mesurer une centralité sont insuffisantes. Pour palier cette difficulté, nous avons élaboré une mesure théorique prenant en compte l’effet de centre relatif et brut.

La nécessité d’un travail théorique

L’INSEE propose une carte de la centralité principalement à travers les bassins de vie. Depuis 2012, ceux-ci ne prennent plus en compte les emplois (utilisés pour définir les zones urbaines) mais uniquement les équipements. Cependant, pour une échelle fine comme la nôtre, les résultats sont insuffisants notamment en ce qui concerne les régions périurbaines autour de Nantes (près de 40 communes dans le bassin de vie de l’INSEE).

Pour le commerce, on pourrait s’appuyer sur les fichiers clientèle des magasins pour déterminer une zone de chalandise. Mais ces données sont privées et donc quasiment inaccessibles. Par ailleurs, tous les magasins ne disposant pas de ce type de fichier, la donnée n’est pas exhaustive.

L’attraction communale pourrait aussi être donnée par l’emploi. L’INSEE nous permet en effet de connaître les flux domicile-travail des actifs. Toutefois pour des raisons de confidentialité, les données ne sont disponibles que pour des flux supérieurs à 100, ce qui pose problème pour définir de petites polarités.

Ne disposant donc pas d’indicateurs satisfaisants pour définir une polarité, nous avons élaboré une méthode théorique permettant de calculer l’attraction ou l’évasion qui s’effectue sur une commune d’un point de vue relatif puis brut.

L’effet de centre relatif : sur et sous-équipement par rapport à la population

Pour mesurer le rayonnement en termes de commerces et de services, nous avons utilisé « l’indice de localisation commerciale ». Inspiré de l’indice de localisation de l’emploi développé par B. Mérenne-Schoumaker en 1991 et utilisé par Valérie Jousseaume pour sa thèse sur les bourgs-centres de Loire-Atlantique (1996) cet indice mesure la différence entre la répartition du commerce et des services et la répartition de la population à l’échelle départementale. Il permet d’observer les lieux de concentration de l’équipement, ou à l’inverse les espaces peu équipés relativement à leur population et au reste du département. L’indice de localisation commerciale se construit selon la formule suivante :

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Un indice égal à 1 correspond à une répartition des équipements conforme à la répartition de la population au niveau départemental. Supérieur à 1, il indique une attraction positive.

Inférieur à 1, il indique une évasion commerciale. Cet indicateur a été utilisé pour chaque catégorie de commerces et services : commerces, éducation, santé, sports et loisirs.

Pour mesurer le rayonnement en termes d’emplois, nous avons comparé le niveau des emplois localisés sur la commune avec le niveau des actifs résidant sur la commune, mesuré à partir des données 2009 de l’INSEE par la formule suivante :

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Plus le taux est élevé, plus la commune attire des actifs extérieurs.

Nous pouvons ainsi observer sur la carte no 8 que les communes très rayonnantes en termes d’emploi sont finalement plutôt rares. Les communes les plus rurales du département sont plus fortement touchées par un déficit d’emplois par rapport à leurs nombre d’actifs résidents. Par exemple, l’indice de localisation de l’emploi de Noyal-sur-Bruz est de 0,23, c’est-à-dire qu’il y a 23 emplois pour 100 actifs occupés résidant sur la commune.

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La carte no 9 illustrant la centralité commerciale relative est différente. Les communes littorales comme La Baule, avec une offre théorique équivalente à 3 fois le niveau de sa population, ou comme Pornic qui a une offre commerciale théorique représentant plus de 2 fois sa population, sont sur-équipées en raison de leur forte activité touristique. Les communes périurbaines apparaissent plutôt sous-équipées par rapport à leur niveau de population élevé. Les communes rurales oscillent entre sous-équipement relatif modeste ou important.

La carte no 10 des zones d’équipements et services de santé, correspond davantage à une dichotomie rural-urbain. Là encore les espaces littoraux sont plutôt bien équipés par rapport à leur population, principalement parce qu’ils accueillent une proportion plus importante de retraités. Les villes et bourgades, comme Nozay ou Machecoul, constituent également de petites polarités de santé avec des services correspondant à plus de 1,3 fois leur population.

La carte no 11 représentant l’effet de centralité relatif des services d’éducation montre bien le fait que les communes situées à proximité d’une commune fortement équipée par rapport à sa population souffrent d’un sous-équipement relatif. Par exemple à Trignac, l’offre en services d’éducation ne correspond qu’à environ 50 % de sa population. L’équipement d’une commune influe donc sur celui de ses voisines. Les villes ou petites villes sont également des espaces très fortement attractifs notamment parce qu’ils concentrent les équipements les plus rares.

L’effet de centralité relatif des sports et loisirs illustré sur la carte no 12 est plus singulier. Les communes rurales du nord par exemple apparaissent bien équipées par rapport à leur population comme Petit Auverné avec un indice de 2,5 c’est-à-dire que son offre en matière d’équipements de sports et loisirs lui permet théoriquement d’accueillir plus de 2 fois sa population communale. Il faut toutefois remarquer que pour ces communes peu peuplées, la seule présence d’une salle de sports ou d’un terrain de tennis fait augmenter considérablement l’indice. Parallèlement, les villes ou communes périurbaines souffrent d’un équipement plutôt faible par rapport à leur population. On retrouve là encore l’impact du poids démographique : ces communes souvent très peuplées ont un équipement important en poids mais qui ne correspond pas à leur taille démographique par rapport à la moyenne départementale. Globalement, peu de communes sont touchées par un fort sous-équipement en sports et loisirs.

Figures 9 à 12 – Effet de centralité relatif des commerces et services en Loire-Atlantique

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L’effet de centre brut : volume de l’attraction ou de l’évasion des usagers

Si le rayonnement relatif exprime un sur ou un sous-équipement et donc une attraction ou une évasion potentielle, la mesure du volume réel permet de chiffrer une attraction/évasion théorique. Nous avons donc appliqué le taux d’attraction ou d’évasion à la population municipale. En effet, pour un même taux, les conséquences sont différentes selon qu’il s’agit d’une commune de 1 000 ou 20 000 habitants par exemple. Concernant les commerces et les services aux personnes, pour mesurer l’attraction/évasion dans les 4 catégories de commerces et services (commerce, santé, éducation, sports et loisirs), la méthode s’appuie sur l’indice de localisation commerciale.

En premier lieu, pour calculer la clientèle théorique de chaque commune, la population municipale est multipliée par l’indice de localisation défini lors du calcul du rayonnement relatif. Ensuite, la soustraction suivante est réalisée : clientèle théorique – population municipale. L’excédent exprime un volume de clientèle attirée. Un déficit exprime le volume de l’évasion commerciale.

Concernant l’emploi, l’attraction-évasion brute est calculée par la soustraction suivante : nombre d’emplois au lieu de travail – nombre de résidents actifs occupés.

La carte no 13 de l’emploi confirme qu’il n’existe que peu de communes centres d’emploi (17 communes). Parallèlement, il n’y a pas non plus de communes fortement déficitaires en volume. La carte no 14 souligne la plus forte dispersion des communes attractives en matière de commerces. La forte attractivité des zones littorales est due au sur-équipement lié à leur activité touristique. La ville de Nantes (attraction de 74 667 clients théoriques en plus de sa propre population municipale) apparaît également comme très attractive tandis que les communes périurbaines souffrent d’une légère évasion. Qu’en est-il alors de l’équilibre de l’agglomération nantaise ? L’ensemble de la communauté urbaine peut théoriquement accueillir environ 35 000 clients en plus de sa population. Mais l’offre théorique des communes du nord hors Nantes correspond à près de 14 000 clients en moins par rapport à leur population tandis que celles du sud présente une évasion théorique de 25 000 clients par rapport à leurs populations municipales. La carte no 15 concernant l’attraction des services de santé est très concentrée sur quelques communes qui rayonnent sur le territoire alentour. L’offre de Clisson correspond ainsi à 4 300 usagers théoriques en plus de sa population municipale. Nozay pourrait théoriquement accueillir 1 400 usagers de plus que sa population.

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La carte no 16 présente le même schéma pour l’éducation avec une très forte attraction nantaise due à la présence des grandes écoles et des universités. Enfin la carte no 17 des sports et loisirs est là encore singulière. Dans le milieu rural, de nombreuses communes attractives sont présentes tandis que les grandes villes et notamment Nantes sont fortement touchées par l’évasion. Les communes périurbaines présentent aussi des caractéristiques semblables : malgré un nombre d’équipements importants, ils ne correspondent pas à la population importante de ces communes.

Figures 14 à 17 – Effet de centralité brut des commerces et services en Loire-Atlantique

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3. Effet de taille, effet de centre : une armature urbaine identifiée

Pour obtenir l’armature urbaine de la Loire-Atlantique, nous avons croisé l’effet de taille et l’effet de centre.

Une analyse statistique

L’armature urbaine de la Loire-Atlantique peut désormais être établie à partir du traitement statistique des 14 indicateurs suivants : population communale, nombre d’emplois, surfaces commerciales, nombre de points BPE pondérés, indice de localisation pour l’emploi, les commerces, la santé, l’éducation, les sports et loisirs et niveau brut d’attraction/évasion pour l’emploi, les commerces, la santé, l’éducation, les sports et loisirs.

Premièrement, une analyse par composante principale a été effectuée pour réduire l’information statistique. De nouvelles variables ont ainsi été obtenues. Dans un second temps, une classification ascendante hiérarchique a permis de répartir les communes en types regroupant celles qui se ressemblent le plus. L’armature urbaine se divise alors en quatre grands types et treize sous-types.

Deux représentations complémentaires

Deux représentations sont ici proposées : une carte en aplat de couleurs qui permet d’identifier pour chaque commune son type (fig. 18) et une carte de synthèse en symbole pour mettre en avant l’organisation territoriale de la Loire-Atlantique (fig. 19).

Figure 18 – L’armature urbaine de la Loire-Atlantique

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Figure 19 – L’armature urbaine de la Loire-Atlantique

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Quatre grands types de communes

Les cartes permettent de dégager 4 grands types de communes : les villes, les polarités périurbaines, les bourgs-centres et les communes ordinaires.

Les villes

Elles sont peu nombreuses. Nantes se retrouve logiquement au niveau grande ville. Saint-Herblain rejoint Saint-Nazaire comme ville moyenne. Si Châteaubriant et Ancenis apparaissent comme des petites villes complètes c’est-à-dire bien équipées et attractives dans tous les domaines étudiés, Guérande, Pornic et La Baule sont peu rayonnantes en termes d’emploi.

Les polarités périurbaines

L’espace périurbain est moins homogène qu’il n’y paraît. Des polarités spécifiques existent que ce soit par rapport à une fonction résidentielle, d’emploi ou de commerces et services. Toutefois, ces pôles sont souvent peu attractifs par rapport à leur niveau de population.

Les bourgs-centres

Entre les villes et les communes ordinaires, ils constituent l’échelon intermédiaire de l’armature urbaine. Proches des grandes villes, se retrouvent Blain ou Vallet, de gros bourgs-centres avec une taille moyenne à l’échelon départemental malgré un faible rayonnement de l’emploi. Les autres bourgs-centres sont situés à un niveau intermédiaire d’un point de vue géographique. Ils sont tous caractérisés par un rayonnement important du secteur public (santé et éducation). Il s’agit pour beaucoup de chefs-lieux de canton. On peut toutefois différencier les bourgs-centres avec des emplois (Machecoul ou Nozay) des bourgs-centres avec peu d’emplois (Legé ou Derval). Les bourgs balnéaires (Mesquer ou Les Moutiers) se distinguent par leur activité touristique qui fait augmenter les niveaux d’emplois, de commerces et de services.

Les communes ordinaires

Elles sont caractérisées par un niveau de dépendance important aux autres communes. Les grosses communes peuplées ont néanmoins été intégrées dans l’armature urbaine puisqu’elles représentent des bourgs bien équipés en commerces, services et emplois et donc des polarités locales. La carte en symbole permet de mieux visualiser l’armature urbaine. Deux zones d’homogénéisation où les polarités sont nombreuses se dessinent : la partie littorale et l’agglomération nantaise. Le vignoble nantais présente également une armature dense, en lien avec son passé agricole particulier. Parallèlement, le nord du département apparaît moins dense en comparaison tout comme le centre du pays de Retz.

Conclusion

Notre méthode permet donc d’obtenir un classement des communes en regroupant celles qui se ressemblent selon leur taille et leur centralité. Les résultats correspondent globalement au modèle christallérien et les polarités anciennement identifiées (Jousseaume, 1996) se retrouvent sur la carte. Cela confirme la forte pérennité de l’armature urbaine dans le temps. Sainte-Pazanne fait exception, elle n’apparait pas parmi les bourgs-centres de notre carte. Bien qu’identifiée comme pôle d’équilibre dans le SCoT du Pays de Retz, adopté fin 2012, aujourd’hui sa forte dépendance en matière de commerces, services et emplois ne la distingue pas des communes peu à moyennement équipées, très dépendantes dans notre étude. De la même manière Ligné, qui est pourtant présentée comme un pôle de développement périurbain dans le nouveau document d’orientations et d’objectifs du projet de SCoT du Pays d’Ancenis (alors que Riaillé est considéré comme un pôle de proximité, au même titre que Mesanger ou Joué-sur-Erdre) ne se distingue pas dans cette armature urbaine.

Si l’organisation christallérienne est pérenne dans les grandes lignes, deux changements apparaissent tout de même. Sur le secteur littoral, l’économie touristique associée à une économie résidentielle axée sur les retraités a conduit à un sur-équipement des communes. Le renforcement des polarités littorales induit une concurrence en terme d’attraction avec les communes rétro-littorales. On peut émettre l’hypothèse qu’une multitude de polarités littorales favorise une moindre attraction de l’arrière-pays comme à Saint-Père-en-Retz. Une attention particulière doit donc être portée sur la forte polarisation littorale afin d’éviter un déséquilibre majeur. Autour de la ville de Nantes, il existe une zone de banalisation du périurbain avec un ensemble de communes bien équipées, avec de l’emploi et de la population mais sans nécessairement de réel phénomène de centralité. Ainsi les polarités anciennes s’atténuent, formant une vaste banlieue périurbaine. Comment alors intégrer ces polarités périurbaines particulières dans une réflexion départementale ?

Par ailleurs, si on constate globalement une forte permanence des polarités sur le département, il apparaît nécessaire, dans un second temps, de croiser cette armature urbaine avec les dynamiques récentes et de long terme en matière d’emploi, de population ou d’équipements. En effet, on constate des mouvements importants de population mais aussi des créations d’emplois très variables selon les communes, qui peuvent conduire les unes à se rapprocher d’un équilibre actifs résidents/emplois localisés ; les autres à s’en éloigner. Leur rayonnement s’en trouve nécessairement affecté

À partir de ce portrait, la question de la nécessité d’une armature urbaine identifiée pour un département est donc plus que jamais d’actualité. La qualité et l’intensité du maillage territorial, mais aussi la reconnaissance d’une hiérarchie urbaine, concourt à la lisibilité du territoire et à la répartition équilibrée des équipements et des services. Comme l’écrivait déjà R. Caillot en 1962 : il s’agit de « réaliser le développement harmonieux des zones urbaines et rurales en faisant du ˝réseau urbain˝ hiérarchisé l’armature même du monde rural, et non son succédané. ».

Bibliographie

CAILLOT R., 1962. La Loire-Atlantique et la Vendée en face de leur avenir, Comité d’expansion économique « Loire-Atlantique – Vendée », tome 1, 323 p.

CHRISTALLER W., 1966. Central places in southern Germany (publié en Allemagne en 1933), 230 p.

JOUSSEAUME V., 1996, Les bourgs-centres à l’ombre d’une métropole, l’exemple de la Loire-Atlantique, Thèse de doctorat, Université de Nantes, 590 p.

MERENNE-SCHUMAKER B., 1991. La localisation des industries, Nathan, 191 p.

RENARD J., 2012. Les campagnes nantaises 1960-2010, un demi-siècle de révolutions sociales et paysagères, Presses Universitaires de Rennes, 192 p.

SCoT du Pays d’Ancenis (projet)

SCoT du Pays de Retz, 2012.

Illustrations

Figures 1 à 3 – Effet de taille en Loire-Atlantique

Figures 1 à 3 – Effet de taille en Loire-Atlantique

Figures 4 à 7 – Poids des commerces et services en Loire-Atlantique

Figures 4 à 7 – Poids des commerces et services en Loire-Atlantique

Figures 9 à 12 – Effet de centralité relatif des commerces et services en Loire-Atlantique

Figures 9 à 12 – Effet de centralité relatif des commerces et services en Loire-Atlantique

Figures 14 à 17 – Effet de centralité brut des commerces et services en Loire-Atlantique

Figures 14 à 17 – Effet de centralité brut des commerces et services en Loire-Atlantique

Figure 18 – L’armature urbaine de la Loire-Atlantique

Figure 18 – L’armature urbaine de la Loire-Atlantique

Figure 19 – L’armature urbaine de la Loire-Atlantique

Figure 19 – L’armature urbaine de la Loire-Atlantique

Citer cet article

Référence électronique

Lucie Faguet, Benoît Ferrandon et Valérie Jousseaume, « L’armature urbaine de la Loire-Atlantique », Cahiers Nantais [En ligne], 1 | 2013, mis en ligne le 04 mars 2021, consulté le 25 avril 2024. URL : http://cahiers-nantais.fr/index.php?id=1187

Auteurs

Lucie Faguet

Géographe, étudiante en Master 2 SAGT, Université de Nantes

Benoît Ferrandon

Chef du service études et innovation publique au Conseil général de Loire-Atlantique

Valérie Jousseaume

Géographe, Université de Nantes, UMR 6590 ESO-Nantes

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